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Interview WARREN HAYNES de GOV’T MULE
POUR ROAD TO JACKSONVILLE
( OCTOBRE 2009 )

par Yves Philipot (interview et traduction)

Bonjour Warren merci de nous accorder une nouvelle interview après celle donnée juste
avant que tu montes sur scène au Trabendo à Paris en avril 2005. ?

WH : Je m'en souviens : c'était mon anniversaire.

A ce propos peux-tu nous dire pourquoi les fans français n’ont malheureusement pas eu droit à une nouvelle date de concert de Gov’T Mule.

WH : Et bien on a essayé. Je pense qu'il se peut que nous puissions revenir en France l'an prochain. Nous devions y faire une courte tournée européenne en novembre mais ça ne s'est pas fait, alors nous reviendrons par chez vous dans la première moitié de 2010, donc j'espère,
nous verrons…

Voilà de bonnes nouvelles pour nous! Nous espérons que vous pourrez le faire.

WH : Oui.

Grande nouveauté pour les fans, peux-tu nous présenter votre nouveau bassiste Jorgen Carlsson ? Et que vous apporte-t-il ?

WH : Jorgen est là depuis plus d'un an maintenant et son son et son style sont très agressifs. D'une certaine manière, il rappelle le bassiste original Allen Woody. Jorgen a assuré de façon merveilleuse sur scène, Il y fait partie de Gov't Mule de la même façon aussi qu'en studio pour un nouvel album. De ce côté-là, il a contribué d'une manière exceptionnelle et donc nous sommes très excités, nous avons une nouvelle alchimie et c'est… (il cherche ses mots, NdR) le groupe sonne désormais d'une manière stupéfiante.

D'une autre manière?

WH : Oui, je le pense : tu sais, je pense que par certains côtés il donne une meilleure assise qu'Andy Hess au groupe, bien qu'Andy fût déjà un super musicien et fît un merveilleux boulot. Je pense que ce qu'apporte Jorgen nous permet en fait de nous tourner aussi bien vers les scènes des débuts de Gov't Mule que d'évoluer dans le futur.

Chacun sait que Allen Woody était un fidèle des basses Gibson, et que Andy Hess, son remplaçant, jouait plutôt sur Fender. Le choix de Jorgen Carlsson, présenté sur votre site officiel avec une Gibson Thunderbird dans les mains alors qu'il joue aussi sur une vieille Gibson RD et sur une plus classique Fender Precision marque-t-il l'envie de retrouver un son de basse proche de celui d'Allen?

WH : Well, pour le nouvel enregistrement, il a joué sur sa Fender Precision bass et aussi sur une Gibson EB bass, dont il joue sur "Broke Down On The Brazos" qui sonne de façon extraordinaire, il a aussi utilisé une Thunderbird. Je pense que, quelque soit la basse sur laquelle il joue, il a envie d'avoir un son plus agressif, qu'il soit sur Fender ou Gibson

C'est dans les doigts?

WH : C'est ça! Il utilise aussi quelquefois un médiator, il aime un genre de son plus "sale". Pour le nouveau disque, nous avons enregistré la basse sans boîte de direct qui élimine l'ampli.

Quelles ont été les raisons du départ de Andy Hess ?

WH : Andy nous a quittés pour des raisons très personnelles. Son départ nous a un peu choqués, mais tu sais, il avait ses propres objectifs à poursuivre, et ses propres rêves.

Ce fut une surprise pour vous?

WH : Ce fut une surprise, oui. Je ne suis pas sûr, pas sûr à 100%, de la raison pour laquelle il a pris cette décision mais c'était à lui de la prendre. Maintenant que nous avons joué avec Jorgen, nous pensons que peut-être il y avait une raison pour que ça arrive ? ..

Peux-tu nous en dire plus sur la signification du titre de l’album "By A Thread", qui peut avoir plusieurs sens ?

WH : Eh bien, il a sans aucun doute plusieurs sens. Il est venu d'une des paroles de "Steppin' Lightly" mais si tu le considères comme un titre d'album, c'est plus une pensée politique au sujet de l'état du monde et je pense qu'il se connecte alors plus directement avec le dernier titre du disque, "World Wake Up" ("Le réveil du monde", NdR.). C'est plus une autre nuance pour... (il cherche ses mots, NdR) comment aujourd'hui vont les choses dans leur ensemble d'un point de vue américain, parce que l'Amérique fait maintenant l'expérience d'un changement positif et espère pour la première fois depuis longtemps. Donc, je pense qu'il est très important que dès maintenant tout le monde se rassemble et se lance dans des changements positifs pour le monde, parce que nous vivons là un moment très très crucial, et c'est ce à quoi "World Wake Up" se réfère et c'est ce à quoi le titre se réfère aussi, mais il se réfère aussi pour tous là à un niveau personnel, tu sais, quand la situation de quelqu'un ne tient qu'à un fil, c'est à dire en s'en sortant tout juste.

Je crois savoir que toi et les Allman's vous avez soutenu l'arrivée du président Obama, or dans le milieu du Rock aux Etats Unis tout le monde n'a pas la même position, alors, sans faire de polémique, quelle est ton sentiment sur les groupes tels que Lynyrd Skynyrd qui s'opposent farouchement aux idées du nouveau président ?

WH :Je suppose que tu te réfères à la dernière production musicale de Lynyrd Skynyrd.

Oui, et aussi à certaines déclarations de Rickey.

WH : Je n'ai pas encore écouté le nouveau Lynyrd Skynyrd mais ce que j'ai entendu diffère vraiment beaucoup de mes opinions politiques personnelles. Tu sais, que ce soit moi-même,l' Allman Brothers Band, le Grateful Dead ou les autres groupes avec lesquels j'ai travaillé, tous ont soutenu Barak Obama et ont récolté des fonds pour l'aider. Je ne comprends pas que le moindre musicien n'entende pas ce sentiment. Je ne comprends pas qu'un être humain n'appartienne pas à cette sensibilité, surtout les musiciens, qui sont censés être créatifs, passionnés et sensibles. Cela me permet de mesurer à quel point quelqu'un peut être de l'autre bord mais ça, c'est leurs affaires, tu sais.

Oui, je pense que Ronnie Van Zant qui a écrit des choses comme "Things goin' on" ("Il y a des choses qui se passent") ou "Lend a helpin' hand" ("Tend une main secourable") aurait eu une autre façon de penser.

WH : Tout à fait! Je pense aussi comme toi mais il est difficile de se lancer dans des spéculations.

Peux-tu nous dire où et comment vous avez enregistré cet album?

WH : Nous l'avons enregistré à Austin Texas, dans le Studio de Willie Nelson. Et c'est dans ce même studio que nous avions aussi enregistré "High & Mighty", notre dernier album. C'est réellement un super endroit pour enregistrer, tu sais, pas de distraction, c'est resté au milieu de nulle part. C'est agréable de n'avoir à penser qu'à la musique, tu sais. Ils sont super équipés, très ancienne école, avec une technique en analogique, des amplis à lampes, ... console, très souvent en restant assis peinards pour capturer le son de telle manière qu'il en devienne un beau matériau.

Vous avez enregistré selon les bonnes vieilles méthodes?

WH : Oui, nous avons enregistré sur des bandes analogiques, 15 RPS, et nous avons enregistré avec chacun d'entre nous installé dans la même pièce que les autres, en nous regardant comme si nous nous produisions live.

C'est important pour la dynamique du groupe ?

WH : Oh oui! Je pense que c'est très important pour ce style de music. Je pense que la seule façon d'avoir la cohésion dans le jeu que nous exigeons est d'enregistrer chacun pendant que nous jouons tous ensemble. Pour certains types de musique, peut-être que ce n'est pas aussi important mais pour le style de musique que nous aimons, je pense que ça l'est!

Par moments, sur "Steppin' Lightly", on ressent une atmosphère proche d'un des vieux titres de Pink Floyd, en particulier au niveau des lignes de basse. Aviez-vous envie de rendre hommage ou est-ce juste un clin d'œil ?

WH : Je pense que nous avons juste dû chopper ce truc naturellement. Quand nous avons écrit ce morceau, nous étions tous à faire le bœuf ensemble dans le studio et là nous nous sommes retrouvés face à la musique surgie de l'ensemble du groupe et c'est venu très rapidement,, alors je pense donc que c'était juste un énorme truc naturel et je me suis éclipsé pour écrire quelques paroles, et puis je suis revenu et nous l'avons enregistré.

Pouvons-nous avancer que les racines musicales du groupe sont ressorties à ce moment-là et que c'est pourquoi ça sonne de cette manière?

WH : Oui, je suppose. Tu sais, j'aimerais préciser que nous avons tous tellement d'influences diverses…que c'est impossible que toutes ces influences ressortent dans ta musique mais, de temps en temps, elles sont censées refaire surface, et je pense que les musiciens, tels que je les conçois, doivent être conscients de ce qui t'influence sur le moment,, nous écoutons tous tant de sortes de musiques, du rock à la soul music au death (metal, NdR) au bones à la musique folk au reggae, et à tellement de façons différentes de concevoir le son, tous ces détails ont un jour été l'objet d'un point de discussion dans notre propre son, mais heureusement, d'une certaine façon, ce studio sonne comme sonnerait celui de Gov't Mule.

Le morceau "Railroad Boy" a surpris pas mal de gens avec sa tendance celtique, qui a eu cette idée ?

WH :Et bien, nous nous sommes tous orientés vers des morceaux que j'avais appris quand j'avais 14 ou 15 ans, quand c'était ma période folk music dans ma ville natale (Asheville, Caroline du Nord, NdR). Je m'étais fait des amis parmi les musiciens folk et les chanteurs, ceux qui écrivaient les morceaux. Ils m'ont appris "Railroad Boy" et ça m'est resté dans un coin de la tête toutes ces années. Pour différentes raisons, je n'avais jamais pensé jusqu'à maintenant à lui appliquer un traitement rock et quand nous en avons eu l'idée, tout est venu très rapidement. Tout le monde a simplement fait sa partie et nous avons enregistré très très vite, nous sommes très heureux de la façon dont ça s'est réalisé et c'est sympa d'avoir un arrangement rock sur un folk song.

Es tu intéressé par la musique celtique ? Ou la culture celtique ?

WH : Oui, vraiment. Quelque soit la période de ma vie, il y a une grande part de moi-même qui est restée très influencée par tous les différents types de musique folk et je pense que cette sorte de style a influencé une bonne partie du rock'n roll aussi bien que (ceux qui sont nés ici ne le réalisent pas ) la musique country américaine.

Sur cet album on note aussi l’apport du Hammond B3, est-ce voulu cet apport des claviers ?

WH :En fait, dès que Danny a rejoint le groupe il y a environ sept ans, il a apporté beaucoup de sons différents au groupe. Un de ceux-là est le son classique du B3 avec lequel nous avons déjà réalisé un titre sur "Déjà Voodoo". C'est un de mes claviers favoris, et c'est un son dont je ne me suis jamais lassé. C'est sensible, classique, ça a un timbre voué au fabuleux, avec juste un peu de technologie.

Le morceau Inside Outside Woman Blues #3 rappelle la Mule des débuts en trio par son coté puissant, est ce voulu ? Peux-tu nous en dire plus sur l’histoire de ce titre ?

WH : Nous l'avons appellé "numero trois" parce que nous en avons fait trois versions. Et je me suis démené pour que les trois versions soient disponibles pour les fans. "Numéro un" est apparu tranquillement dans le final quand le final s'est dégagé, dans le "numéro deux" nous étions toujours à essayer de décider où il pourrait bien apparaître. Mais nous rendrons disponibles les trois versions pour nos fans. Versions que nous aimons toutes les trois, donc nous avons pensé qu'il serait bien de les numéroter.

En Europe on a eu certaines difficultés à apprécier Mighty High, l'album reggae expérimental sorti en 2007, comprends-tu nos interrogations ?

WH :Je pense que peut-être en Europe les gens n'ont pas réalisé que "Mighty High" n'avait pas pour mission d'être le prochain album studio de Gov't Mule. C'était un E.T., c'était des sons différents et une tentative que nous avons faites vers le dub avec des mix de morceaux du répertoire, rien de plus qu'un E.T., je suppose qu'un fan de reggae et de dub pourrait l'apprécier et ce n'est pas… ensuite tu peux peut-être l'aimer, peut-être pas, mais ce n'était qu'un hommage pendant son vivant pour indiquer quelques nouvelles directions pour Gov't Mule.

Peux-tu nous dire quelle est ta position sur le téléchargement illégal de cds ?

WH :C'est difficile d'en parler parce que je pense que dans notre monde qui change de technologies, ça change tous les jours et tu sais, en second rôle, c'était bien, mais si c'est nous qui devons tenir le second rôle, alors nous ne sommes plus d'accord. Nous avons mesuré le changement au moment où nous nous nous saisissions des shows et les enregistrions dans la mesure où l'argent ne changeait plus rien dans ce que nous avions fait depuis les tout débuts de Gov't Mule. Tu sais, c'est difficile dans la mesure où dans un sens quelques téléchargements limités te permettent de parler de ta musique à des gens qui ne l'auraient pas écouté autrement, mais avec les évolutions de l'industrie musicale jusqu'à la situation actuelle et le fait que les musiciens aient à nourrir leur famille, à partir du moment où vos rentrées d'argent dépendent de ça…

Tu apprécies beaucoup de genres musicaux, mais quels sont vraiment les groupes pour qui tu as une grande admiration dans le Classic Rock, le Blues, le Hard Rock, etc ...?

WH : Et bien, j'en suis venu à aimer réellement la musique dont je pense qu'elle est intemporelle, tu sais la musique qui pourra être présente cinquante ans plus tard. Ça peut être du blues, du jazz, du rock'n roll. Simplement, je n'aime pas la musique à la mode, celle où les gens essaient de surfer sur la tendance du jour. Et donc toutes les influences que nous avons choisies en tant que groupe sont des influences que nous croyons intemporelles. C'est le seul préalable qui soit un critère de choix dans nos influences. C'est le propre de la création, surtout si tu as envie de te faire ta place dans le monde de l'art et de la musique…Ouais, parce que tu sais, je veux dire que personne n'a envie d'écouter quelqu'un copiant quelqu'un d'autre, parce que ça a déjà été fait, donc tu essaies de créer quelque chose, en espérant que ce sera vraiment le cas,….

En Europe on place souvent la musique de Gov't Mule dans la catégorie Southern Rock. Étant donné que musicalement tu traverses de nombreux styles musicaux, ne crois-tu pas que l'étiquette Southern Rock ne convient pas à Gov't Mule ?

WH : D’une certaine façon, ça convient, d'une certaine façon ça ne convient pas. Je pense que si tu regardes the Allman Brothers Band comme les pères et même les fondateurs du rock sudiste, ça peut faire sens parce qu'ils sont en jazz, en blues, en soul music, en rock'n roll music et folk music à la fois, mais un tas de groupes se sont engouffrés par cette porte et furent ainsi considérés comme des groupes de rock sudiste avec qui nous n'avons rien en commun, mais en contrepartie nous avons aussi un paquet d'influences aussi fortes comme Cream et des groupes de cet acabit ont été des influences. Je pense que rock sudiste est juste une façon d'appeler les choses.

Et le terme Southern Rock veut-il dire quelque chose de précis pour toi ou bien tu ne souhaites pas différencier la musique ?

WH :Je pense que quelquefois aux Etats-Unis, le rock sudiste doit supporter quelques formes de connotation négative et nous ne voulons pas être pris là-dedans. Nous ne nous considérons pas nous-même comme "rock sudiste" et... mais si quelqu'un est fan de rock sudiste et englobe Gov't Mule dans cet ensemble, je suppose que c'est OK, mais nous ne le voyons pas de cette manière.

Connais-tu la Simple Man Cruise et aimerais-tu y participer ?

WH :Je ne pense pas que c'est le genre de truc que j'aimerais faire. Je n'aime pas être sur un bateau, de toutes façons. (rires) (Il le dit de telle manière qu'on comprend qu'il est sujet au mal de mer, NdR)

Dans les nouveaux groupes venant du sud, connais-tu BLACKBERRY SMOKE ?

WH :J'ai entendu le nom, mais je n'ai jamais entendu la musique.

Y a-t-il, dans les groupes que tu côtoies ou que tu écoutes, un groupe ou un disque que tu nous recommanderais d’écouter ?

WH : Le groupe Earl Greyhound et un autre groupe Loneby in Sauce et j'aime les deux disques. Ce sont tous les deux de jeunes groupes indépendants élaborant une musique rock intéressante.

Combien as-tu de groupes hormis la Mule et Allman actuellement, peux-tu nous en dire plus sur tes futures collaborations ?

WH : Eh bien quand je ne vais pas avec la Mule et les Allman Brothers, j'ai seulement passé dix mois cette année avec le Grateful Dead . L'an prochain, le Grateful Dead ne tournera pas l'Allmann Brothers Band tournera moins, alors Gov't Mule va pouvoir fonctionner.

T’arrive-t-il de te reposer ? Et en ce cas que fais-tu ? Quel est ton hobby préféré ?

WH : J’ai très peu de temps libre, et je le passe avec ma femme, me réveillant le matin pour mener une vie propre, regardant des DVDs, j'aime aller chez des potes. J'aime les sports. Quand j'étais gosse, j'ai fait du basket ball, du football américain et surtout du base ball.

Si tu devais former un super groupe, qui inviterais-tu ?

WH : Pour un concert?

Oui.

WH :Gov't Mule!

Peux-tu nous citer les 5 albums que tu emmènerais si tu devais finir ta vie sur une île déserte ?

WH : Willie Dixon : The Chess Boxset, John Coltrane : Blue Train, Miles Davies : ?, Albert King : Live Wire / Blues Power, Jimi Hendrix : Axis Bold As Love

Merci Warren d’avoir accorder cette interview à Road to Jacksonville !